jeudi 22 janvier 2015

deux mouettes in the blue sky

evening walk along the Atlantic - photo L. Sch.



En vingt jours, j’ai prononcé par jour six ou sept bouts de phrases, en dehors des commandes de repas, et des réponses aux courtoises routinières questions How are you? Thank you I’m fine, and you ?  parfois les gens m’adressent jovialement la parole, me voyant penché sur mes feuillets, ils demandent à quoi je m’occupe, et je leur donne quelques explications sur mon métier, qui n’est pas un métier mais est quand même un métier, et tout ça dans mon anglais approximatif, qui fait un abus de mots d’origine latine, et tout ça sous mon vieux chapeau, mon chapeau aux larges bords qui est censé me protéger des attaques du soleil contre mon trop haut front, et le soir je marche le long de la mer, contemple pensivement les grosses vagues de l’Atlantique lancer leur écume contre les rochers, elles font ça depuis tant de millions d’années, je suis à l’autre bout du monde, et me demande sans cesse ce que je fais à l’autre bout du monde, je pourrais tout aussi bien me demander ce que je fais au monde tout court, bout ou pas bout, j’ai à me transporter, dans mes sandales de clodo, avec le poids de ma tristesse, maudit rejet d’amour qui m’a en pleine poitrine frappé, brisant la moitié de mes côtes, alors je gémis un peu, et là-haut dans le ciel bleu je regarde deux (deux !) mouettes blanches voler, souveraines, portées par le vent, métaphore de légèreté. 
Le murmure du monde, vol. VII

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