dimanche 15 novembre 2015

Fragments du journal intime de Dieu - fragment 11 289





FRAGMENTS DU JOURNAL INTIME DE DIEU


Fragment 11 289 — Au Paradis qui existe maintenant depuis deux mille ans, les bienheureux Pensionnaires passent leur temps, euh, je veux dire, leur éternité dans une tranquillité, une sérénité, parfois, je dois dire, un peu à la limite d’une sorte de béate torpeur, — bref, ils se reposent à fond et pour de bon.
A une exception près : la Sainte Vierge.
Depuis quelques décennies, elle n’arrête de s’agiter. On entend parfois chuchoter dans les célestes couloirs, d’un ton gentiment narquois : « elle a encore fait une de ses descentes… »  En général, pour ce genre d’escapades, elle met sa robe bleue.
Les mortels, en bas sur Terre, appellent ça des apparitions ; depuis le XIXe siècle ils en ont répertorié 2400 ; un de leurs scribes, l’abbé René Laurentin, dans un gros livre, sur mille quatre cent vingt-six pages en a fait le catalogue scrupuleux, avec tous les détails toponymiques, chronologiques, circonstanciels.
Le plus souvent, elle va voir des enfants, de préférence illettrés — et ces enfants ensuite racontent aux adultes ce que la Vierge leur a dit.
Les adultes sont impressionnés, construisent des basiliques et organisent des pèlerinages lors desquels ils font chanter des cantiques et mettent en place des étals avec des bougies, des chapelets, des bouteilles d’eau bénite et des statuettes de la Vierge en robe bleue.

Avec Paul, Pierre et Jésus, entre nous en petit cercle, on ne parle jamais de ces choses-là, ça ne les intéresse pas.



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