samedi 14 janvier 2017

comme dans l'autre siècle - PROSERIES, chap. 99






99.


Le monde si nécessaire si inutile, nos montres sans cesse donnent l’heure exacte, nul besoin de les remonter, comme dans l’autre siècle, je n’ai pas vu leurs intestins où sont logés les ressorts, et les aiguilles, sur le cadran avancent tournent, quand il fait grand silence on entend un lancinant fluet tictac, c’est à Rome qu’il faudrait aller, illico, une fourmi ailée depuis deux heures chemine au fond du cendrier, n’arrive pas à remonter sur les bords, fait des escalades sur les fragments de cendres cylindriques, remonte redescend, avec une sorte d’acharnement sinon de désespoir, tous ces pas inutiles, bien des fois aussi elle retombe sur le dos, se retourne se relève, et continue à cheminer, d’un bord à l’autre, sans pouvoir quitter le lieu, elle semble ne pas se souvenir qu’elle a des ailes, je ne sais pas si elle sait où elle est, je ne sais pas si elle voit où elle est, je ne sais pas ce que voient ses yeux quand elle regarde, ses yeux sont si minuscules que je ne les vois pas, quand j’écrase un mégot je fais attention de ne pas écraser la bestiole, tout autour il y a le monde si nécessaire si inutile, le voyage Rome aller-retour coûterait 7777 rands, dans l’intestin de la montre s’activent les engrenages et les ressorts bandés du temps qui n’arrête de marcher, si nécessaire si inutile.


PROSERIES
chapitre 99
inédit




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